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29.4.07

Etre né pour les bars.

Je suis né pour les bars.
J'essaie d'y remédier, croyez-moi. Sincèrement.Mais je suis né pour les bars. La preuve, j'en ai déjà expérimenté toutes les postures, tous les horaires, tous les métiers, et chacun d'entre eux m'a plu, presque sans condition.
Barman ivre, j'ai fait - quand tu regardes les gens dans les yeux, que tu veux être gentil avec eux, mais quand la caisse fait "dring-dring" et ton patron fait "dong-dong" et le taxi qui t'attendra à la fin de la soirée (si tu chiffres bien en pourboires) s'acharne à faire "faut-voir-faut-voir".
Barman sobre, j'ai fait - quand tu t'étonnes en t'abreuvant du spectacle des gens ivres, tandis que tout ce qui te permet de ne pas penser "bande de cons", c'est qu'à toi tout seul tu as déjà été une fameuse bande de cons trois jours auparavant. Donc tu offres. Plus que le précédent, en fait. Les bouteilles s'alignent comme des connes, et le tube de néon rouge, planqué juste derrière, ne te fait plus autant d'effet que quand tu vacilles de l'autre côté du miroir de zinc. Mais tu es là et les bouteilles aussi ; ce qui constitue quand même une bonne base pour s'entendre - d'autant plus que tu les prostitues un peu, après tout. Le souteneur de la picole. Le Saint-Jonas du Kahlua. C'est toi.
Serveur fatigué, j'ai fait - quand ton corps t'hallucine des trésors qu'il révèle quand tu le fais enfin bosser un peu, mais quand ton foie, aussi, t'hallucine de ce qu'il peut continuer à absorber quand il est déjà mort depuis longtemps.
Serveur sobre, j'ai fait - quand tu débarasses une table vide pour vérifier si des numéros de portables ont été griffonnés à l'arrière des sous-bocks et que, parfois, ben oui, ils ont été griffonnés à l'arrière, ces cons de numéros - que tu n'appelleras jamais, parce qu'il te semble plus prudent de collectionner les petites vanités plutôt que de te coltiner des tas d'emmerdes. Parce que.
Parce que client sympa, entouré d'amis et ivre, j'ai fait aussi - quand le monde se résume à peu près à ce qui est à portée immédiate de tes yeux, quand tu sens que tout ce qui se présente à toi est une création maladive de ton cerveau, et quand tu sais que tu n'es rien d'autre qu'une petite crotte qui prend ses fantasmes pour des réalités.
Client sympa et seul, j'ai fait encore - quand tu es incroyablement présent avec le barman et séducteur avec les gens qui t'entourent et tellement mortel, en somme, que tout le monde s'étonne que tu sois seul... et par conséquent, se taille tracer sa route sans demander son reste. Ce type est trop inquiétant pour être honnête, sans doute. Sans doute oui, donc, d'autant plus que...D'autant plus que client pas sympa et entouré, j'ai également essayé - quand tout le monde te déteste mais que tu t'en branles parce que tu te sens fort. Ensuite, souvent, tu sens que tu es un peu de droite quand même, alors tu vas vomir, et la cuvette des toilettes te semble être le meilleur avenir que tu puisses espérer en ce bas-monde.
Client chiant et seul, je me suis baladé aussi sur ces boulevards là - quand tu es déjà mort depuis longtemps, mais que tu ne sursautes encore frénétiquement dans ta verdeur moisie que parce que tu espères que tout le monde le saura, l'entendra, l'intègrera et ne le comprendra pas. Tu oscilles du rond et tu ne parles à personne : ton objectif n'est ni de t'amuser avec tes amis, ni de draguer, ni de t'entendre bien avec qui que ce soit, mais de te vider de tout sur les pieds du premier branleur qui passera - pourvu que tu puisses te répandre sur ses chaussures et qu'il les ait rutilantes. Ah tiens, d'ailleurs, les tiennes sont rutilantes et propres, comme par hasard. Et vlan, tu te mets à l'ouvrage.
Etre désincarné, j'ai essayé une fois - quand tu te remplis jusqu'à ta propre indignation, que tu te gonfles des horreurs maltées du monde, dans le seul espoir de tomber, d'écraser tes genoux au sol carreleux, une bonne fois pour toutes, en attendant patiemment (ça ne traîne jamais trop) que le monde entier présent dans ce bar (qui n'est autre qu'un création de ton cerveau - ne l'oublie pas) détourne le regard avec gêne.
L'être masochiste, j'ai surfé deux trois fois avec lui, et donc avec moi - quand tu attends un peu, avant de sortir, parce que tu gardes une dignité quand même, - attention, tu es un con au fond -, et puis que tu te lâches, que tu te sors quand même, et que si ton pied droit peine farouchement à rejoindre ton pied gauche, si ta tête en lambeaux peine à accompagner le mouvement global, tu sais intimement que tu as tout gagné, parce que tu es tout ridicule.
L'être seul et malade, loin d'un quelconque lieu de sociabilité, j'ai traîné avec lui, aussi, et un paquet de temps en plus - quand tu rentres chez toi, et que tu te pisses dessus, le pantalon baissé, les fesses congelées contre la froideur du sol et le dos trempé, englué dans la faiblesse de ta puissance, de tes propres sécrétions tellement communes, aussi, que la chaleur de ta pisse sur ton ventre te dit "c'est chaud" et que ta pisse sur ton ventre te dit "tu es une merde " et que ton ventre te dit "pourquoi tu me fais ça, connard ?" et que toi, tu ne te dis plus à toi, connard, rien d'autre que : " tu le mérites, minable, c'est même presque un cadeau que tu te fais."
Quand je vous dis que je suis né pour les bars... finalement.
Vous pouvez me croire.

F. W. Jonas

Pour contacter F.W. Jonas ou un autre auteur de la revue : revuenoiretblanc@hotmail.com ou laissez un commentaire .

Le Temps des Yoyos

Je marche dans la rue déserte. J’entends les pneus crépiter sur la chaussée mouillée, je sens l’air frais qui s’insinue sous le col de ma veste. Les lumières orangées donnent au trottoir une teinte mélancolique. Une soirée paresseuse se présente. Elle ne semble pas prête à sortir pour briller, même le bruit se calme pour la laisser approcher. Les passants paressent, eux aussi, paraissent soudain moins pressés. Ils se demandent si la nuit en attend davantage, si leur respect suffira à calmer ses envies de soupirs et d’yeux mouillés. En attendant de se satisfaire des regrets des hommes, elle couvre le goudron et le béton d’une fine pellicule humide. La légère bruine dégouline et fait couiner les chats de gouttières. Ils n’auront pas de croquettes ce soir, personne n’ouvrira ses fenêtres. Trop peur que le froid en profite pour s’installer.

Quand le froid ne vient pas de l’extérieur, mais du plus profond de toi, que les jours raccourcissent, et te laissent sans lumière sur tes idées, il est temps d’aller se saouler. Je suis descendu dans le métro le plus proche pour parvenir plus rapidement à mes fins. Une fois installé dans la rame quasi déserte, mes yeux ont commencé à scanner les sièges à la recherche d’une distraction en jupon. En voici une, les doigts crispés sur son Blackberry, ce qui enlaidit des mains que je devine fines en temps normal. Amazone technologique, tes boucles brunes embrassent tes joues et embrasent mes joues. Ton front se plisse sous les soucis ; j'admire tes jambes lisses et le velours qui enserrent tes cuisses. Dans cette cage de verre et d'acier que tu chevauches vers ton armée, j'aperçois la femme fatale perdue en toi. J'ai envie de t'enlever, d'enlever tes vêtements, je suis l'or de tes boucles d'oreille, le nylon de tes bas, la laine de cette écharpe posée autour de ton cou, la dentelle sur ta chair. Tentatrice dévouée, tes yeux francs appellent le monde à ton amour, ton odeur m'envahit par rafales, je suis à tes genoux attendant la délivrance, tranche ma nuque ou embrasse moi mais pose tes mains sur moi. Tu pars et je reste coi.

Veux-tu vraiment savoir ce qui se passe ? Je me le suis demandé, et la réponse a vite pointé le bout de son nez… En y réfléchissant, je n’avais jamais été réellement seul. Pourtant ce sentiment hostile m’asphyxiait chaque nuit et chaque jour, comme une seconde peau, une pensée unique universelle adaptable à toutes les situations. Si peu de gens me connaissent, et même eux ne peuvent me sauver de mes angoisses. Il aurait fallu y penser avant peut-être. Il aurait fallu se réveiller il y a quelques années. Mais comme pour tant d’autres matins, ce réveil-là n’a pas sonné. Ma solitude par une sonnerie brisée, mon univers par quelques mots simples sauvé. La chaleur de son cou rayonne encore dans mes yeux ; les étoiles que l’on voit si mal sont mortes depuis longtemps. Leur lumière fantomatique nous parvient tel un message du passé, une réminiscence de choses disparues. Leur éclat qui semble réel s’avère fictif. Ainsi en est-il de mon sourire et des éclairs passagers dans mes yeux : ils s’effaceront vite, rattrapés par la réalité de son absence, la cruauté de son départ.

La fumée me cache la vue, la fumée me gâche la vie, le brouillard me conduit dans un mur. Je ne sais pas me diriger, ma liberté m’envoie dans les mauvaises directions, je n’épouse pas les élans de mon cœur car ils m’envoient dans les bras d’un malheur programmé. Une pulsion morbide inévitable, mes rêves me rappellent la réalité, j’y sombre plus concrètement que dans mes journées mascarades. Chaque nuit a son échec particulier, les formes de la déchéance m’y sont clairement détaillées. Tout le monde est là pour la mort du roi.

Julien Sorrenti

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5.4.07

La tête nue, à peines levées.

« Regardes ma poitrine elle est petite, tu ne trouves pas ? ». Elle m’avait dit cela.
D’une voix à la faiblesse insoutenable ; de celle que l’on voudrait faire taire pour ne pas être celui qui aura assisté aux derniers souffles à peine humides.
De lèvres tout autant effrayantes ; même sans peinture elles paraissaient d’un rouge écarlate sur son teint hâve d’avoir trop jeûné, de s’être trop fait vomir.
Elle m’avait dit cela en pointant ses seins en ma direction.
Le regard fixe sur des amas de graisse atrophiés, une seule réponse me donnait envie de tarir mes poumons d’air :

- Je pourrais te parler durant des heures. T’expliquer ton corps. Te dire que je veille à ce que tu ne parviennes pas à te nier suffisamment bien pour disparaître. Mais tu sais quoi ? Je préfère user ma salive à te la lécher cette poitrine, aussi petite soit-elle.

Je ne crois pas que ma réponse avait fait émerger en elle un semblant de lucidité. La douleur en bandoulière, elle avait immédiatement poursuivi sa trajectoire idiote :

-Et mes trop larges cuisses, tu les supportes toi ? Tu les trouves comment?

J’avais sciemment opté pour la carte « perversité sexuelle ». Lui faire croire que malgré ce corps émacié je l’aimais au point de la désirer. D’un œil faussement vicieux je lui avais répondu :

- Tes cuisses ? Probablement indispensables parce qu’elles savent encore te mener jusqu’à moi. Qu’elles me ramènent leur commissure sombre et ça me va.

Ses mollets. Ses fesses. Son ventre (la partie la plus délicate peut-être : terrain miné de bourrelets invisibles). Ses joues. Ses bras…
Mine de rien, nue, elle venait de réviser son anatomie. Comme avant dans nos cours de sciences naturelles où les corps décharnés faisaient plus rire que peur.
Elle ne paraissait toujours pas tenir compte de mes savantes réponses. Elle préférait pleurer.
Pleurer sans se cacher de moi. Ni d’elle-même d’ailleurs.
Des larmes en effusion qu’elle n’avait à aucun instant tenté de contenir. Pas de place au théâtre lorsque l’on s’occupe à survivre.
Ce liquide salé en plein visage la démangeait et même qu’à trop frotter elle aurait pu s’égratigner les joues.
Elle était planté là, nue, face au miroir à se regarder par-dessus ses yeux brouillés, à se fondre dans la froideur du verre.
Je pouvais entendre les dédales de ses pensées. Je m’ y perds rarement. Je connais les contours de ses faiblesses comme si je les avais créé de mes propres réflexions.
Se mettre nue pour mieux constater les dégâts de mère nature. Un corps entièrement gros.
Un large pantalon, un large pull, un large manteau. Une large dissimulation. Circulez y a rien à voir !
Une grosseur extrême qu’elle s’invente comme un gosse s’inventerait un ami imaginaire. Toujours à ses cotés et personne ne la voit mise à part elle.
Sont corps est atrocement gros, et non d’une périlleuse maigreur. Lui dire le contraire, c’est peine perdue.
Des mois étaient passé sans que je ne lui dise rien.
Et puis ce jour là, sans que je m’y attende vraiment, après son défilé de questions improbables, elle avait fini par me confier une chose.
Je suppose qu’elle non plus ne s’attendait à rien. Jusque là, elle caser tout dans la rubrique « C’est comme cela et puis c’est tout, je ne sais pas moi ! ».
Pas cette fois.
Elle s’était approché de moi pour me verser à l’oreille ce que je pense être un avant goût d’explication. Comme si au plus prés de moi personne d’autre ne risquait d’entendre.
Elle savait pourtant que nous étions seuls dans cette chambre. Il y avait bien notre chat, mais elle comme moi savons que cet amas de poils sur pattes s’en fout pas mal de son existence malhabile.
Probablement qu’elle susurrait ses confessions pour moins les faire exister.
Ne pas trop attiser les fantômes, ceux d’un passé qui cogne plus qu’il n’effleure le cours d’une vie.
Reconstruite sur des ruines, c’est toujours fébrile une vie parait-il.
J’ignore où elle avait puisé le souffle suffisant pour expulser le tout.
« Allez, c‘est bon pour aujourd’hui», c’est ce que j’avais voulu lui dire à plusieurs reprises. Jamais fait.
Je sentais une régurgitation pour une fois salvatrice, bien loin de celle qu’elle savait provoquer les mains en bouche pour maigrir à en crever.
Tout aussi Immonde cette vomissure verbale :

- Tu sais, moi je ne m’en souviens pas vraiment. Ce n’est pas mon souvenir.
C’est la mère d’une amie d’enfance qui me remémore cette anecdote.
Chaque fois que j’ai le malheur d’aller dîner chez elle, elle me ressert cette même histoire de phrase prononcée.
Elle me répète sans cesse, comme si j’allai oublier, à quel point j’étais une enfant triste.
Des amies j’en avais, beaucoup même. Un nombre que tes doigts ne te permettent plus d’afficher.
Dés cinq ans, j’allais seule à l’école. Sans regrets ni craintes. Sûrement que je savais déjà.
Je savais que dans cette petite vie pour subir il valait mieux être le plus seul possible.
Etre tranquille à ne faire pitié à personne, à ne pas devoir garder la face, celle que l’on voudrait voir éclater contre un mur. A ne rien leur imposer aussi.
Sur la route, ce n’était pas des petits cailloux blancs que je jetais. Retrouver le chemin de ma maison ou le perdre, j’avais inconsciemment fais mon choix.
C’était cette phrase que je laissais à la terre propre :

« Ma mère des fois elle est méchante comme les loups. »

Probablement que cette phrase que je répétais à m’en faire mal aux lèvres, était une sorte d’appel à l’aide. Emprisonnée dans une vie de petite fille aux allures un peu tristes mais qui ne manque de rien. La timidité c’est comme l’ivresse, elle a souvent bon dos.
Pas de formulation claire. Il aurait fallu qu’une personne capte le message au-delà de pleines explications, preuve indéniable qu’elle pourrait m’aider me comprenant déjà.
Enfin là j’analyse. À épuiser toutes les façons de percevoir la chose, je n’imagine que celle-ci.

Moi, qui aspirais à détendre l’air d’un passé suffocant :

- J’ignorais que ta mère t’avait fait du mal dans ton enfance. Tu ne m’avais jamais parlé de tout ça. Tu penseras tout de même à me remémorer ce fait.
Juste entre la phrase qui dira « Nous allons séjourner chez ma mère » et celle qui répondra « Non vraiment je ne veux pas séjourner chez ta mère ».
A la campagne, à me demander où sont vraiment les vaches, si tu vois ce que je veux dire ?
Mais bon, je ne vois pas le rapport avec tout ce qui t’arrive depuis des mois.

Elle :

- Tu me fais rire ! Cela ne se voit pas mais tu me fais rire.
Du mal, si on veut…
Autant que je puisse racler les fonds de ma mémoire, je crois que je n’ai jamais été suffisamment bien pour elle.
Elle voulait que je sois belle. Elle avait toujours rêvé d’avoir une fille belle. Elle l’était elle-même alors je peux comprendre.

« A la naissance il y a dû avoir maldonne ».

Cette phrase, sortant de sa propre bouche écoeurante, je l’avais entendu pour la première fois vers l’âge de neuf ans.
Je me souviens avoir étais dans nôtre bibliothèque qui paraissait immense de mes yeux d’enfants. Un dictionnaire, ça dit la vérité.

« Maldonne : n.fém : erreur dans la distribution des cartes ».

Cette définition, aussi vague et éloignée du sujet soit elle, était venu mordre ma tête de fillette.
Comme si depuis le début j’avais saisi le sens de cette phrase, ce leitmotiv que ma mère prononçait d’une discrétion malsaine à mon sujet.
La révéler dans sa littérale exactitude n’était qu’un détail. Je savais déjà tout.
Et ce tout j’avais du mal à me l’enfoncer dans les espoirs.
Je savais que j’étais trop grosse selon elle, « normale » selon ma courbe de croissance pourtant bien gravée dans mon carnet de santé.
J’allais parfois vérifier dans ce carnet. Être bien certaine, ne pas m’être trompé de courbe.
Je demandais aussi à mes copines de classe leurs poids, histoire de comparer.
Je m’étais vite résigné en me disant que ma mère avait ses propres exigences, qu’il n’y avait rien à démentir, rien à comprendre.
Et puis l’abîme déjà amorcée que pouvais-je bien faire ?
Elle scrutait tous les concours de beauté pour enfant, les castings d’acteurs, de mannequins. Elle m’achetait des tas de robes que j’aimais à peine.
Vu que la vie avait décidé d’enfoncer le clou dans ma chair d’enfant, j’allais d’échecs en échecs. SES échecs. Moi je n’étais jamais déçue de perdre ses concours. J’espérais que de cette manière elle allait se rendre.
Mais tu sais, tout ça je m’en foutais pas mal, comme le reste qui aurait pu me percer mais qui effleurait à peine mes émotions.
Ne pas manger ce que je désirais comme une enfant de mon âge c’était du gâteau si j’ose dire. Supporter ses phrases assassines, je savais faire.
J’étais assez téméraire comme enfant en faite.
Ce qui embrasait ma peine d’enfant c’était ma culpabilité. Je voulais qu’elle l’ait sa jolie fille.
Première partie du travail accomplie sans aucun apport personnel : j’étais sa fille.
Etre belle désormais, minutieusement longiligne comme notion première. Plus dure. Je n’avais même pas le sentiment d’être trop grosse.
Alors évidement, je crois que jamais je ne suis parvenu à atteindre ses idéaux à la perte.
Fossoyeuse d’équilibre mental qu’elle était, elle semblait ne rien regretter. Je la soupçonnais parfois d’extraire une jouissance de tout cela.
Elle m’abandonnait aux concours de beauté en sachant que j’y allais à reculons, que j’y perdrai plus que les récompenses, mon bien être.
Pourtant, je n’ai jamais su lui en vouloir, juste l’aimer.

Et puis les années ont passé avec ce goût âcre de déception infligée à ma mère.
Je suis parti faire ma vie sans trop traîner de poids. Il fallait bien que je grandisse. Penser à panser les plaies.
Toi, en amant figé sur mon corps qui te plaisait, je ne pouvais qu’être bien.
Les choses ne sont pas pour toujours.

Depuis de longues minutes, tu m’écoutes placide. Je vois ton visage. Tu attends comme un chien la gueule sèche. De mon passé comprendre ce corps encombrant.
Mais le problème n’est peut-être pas là. Et puis on s’en fout parce que la solution non plus de toute façon.
Je ne sais toujours pas pourquoi depuis quelques mois je suis là, à dégueuler toute ma peine d’un passé qui remonte malgré moi.
Dans les chiottes, les doigts enfoncés dans le fond de la gorge. Effleurer mes amygdales, leur trouver un touché immonde.
C’est sûrement parce que je sais que mon corps est gros. Cette fois il l’est pour de bon. Je le vois. Je ne suis pas à 35 kilos.
Il ne faut pas faire confiance aux machines électroniques qui te disent soit disant combien pèse ta douleur.
Je suis sacrément trop grosse. Ne me dis pas le contraire, c’est peine perdue.

Moi :

-Je ne te dis pas le contraire si tu veux.

Mais laisse moi perdre ma peine.

Des yeux gênés sur moi. Un regard que je voulais fuir pour ne pas avoir à lui faire
trop mal. Un regard semblable à celui d’un enfant perdu dans le noir, les bras tendus vers un infini vide qu’une confession venait d’ébrécher.
En geste réflexe, elle s’était empressé de cacher son corps nu sous un tas de couvertures.
Sous un parfait silence, cacher ses douleurs passées, jaillissantes pour la première fois.

Jamais elle ne s’était senti aussi nue je crois.

Sonia Moussaoui

Pour contacter Sonia Moussaoui ou un autre auteur de la revue : revuenoiretblanc@hotmail.com ou laissez un commentaire .

La fragilité

Je m'envole à la hate, mais sans vouloir, jusqu'aux cieux à partir des maisons sans toits, je m'étends pour un baiser, chacun dure cinq secondes entieres. je vois ses yeux. des flaques cachées de granite liquide. chaque baiser dans une maison différente sous les plafonds noirs et gris, les salles étaient toujours vides et ombragées, dans les maisons que je ne reconnais pas. les nuages se balancaient dans le ciel. il faisait jour. chaque maison sans plafond, sans toit non plus. cieux gris et couverts. je me suis evanouie et je crois que mon esprit s'est fondu. dans une cité inconnue. je ne me rappelle pas du dialogue mais les mots étaient francais. je me demande pourquoi j'avais besoin de m'en fuir. j'étais peut-être un fantôme. l'air était assez froid bien que je sois trop engourdie pour m'en faire. j'ai vu son visage qui s'éteindait, j'ai essayé de voler plus vite. j'imagine que les fantomes puissent voler, si seulement ils pouvaient nager car je nage vite sauf à travers le ciel.

Emily

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Nue, C'était Horrible

Nue. Je n’aurais jamais pensé qu’elle serait aussi belle nue.
La première fois que je l’ai vue, c’était à un arrêt de bus, en plein hiver, elle portait un énorme manteau, si énorme qu’elle avait a peine allure humaine, c’était horrible.
Elle ressemblait à un monstre, à un sale type genre bonhomme Michelin perdue sous moins 40 à Montréal.
Pourtant, je ne sais pas pourquoi mais j’ai tout de suite était attiré par elle.
Elle semblait pas tellement belle, carrément pas très jolie mais on pouvait sentir une douceur, une fragilité qui était irrésistible chez elle.
Alors ça était comme une évidence, il fallait que j’aille lui parler et cela même si elle était mal habillée et qu’elle avait une démarche carrément bizarre, je sentais à l’avance qu’elle allait me plaire, il ne pouvait y avoir que de la beauté sous autant de centimètres de nacryline synthétique.

-Il fait froid, hein.

-…………

Elle m’a a peine regardée, elle m’a jeté un regard froid et cruel, mais pour qui elle se prend celle la, c’est elle qui est habillée n’importe comment et c’est moi qu’elle snob.

-J’ai dit il fait vraiment froid ici ce soir.

-Oui, oui.

-…………….

Ma vie est un échec, 25 ans est toujours incapable de dire autre chose à une fille que je rencontre à un arrêt de bus que il fait froid aujourd’hui.

-Ça fait longtemps que tu attends le bus ?

-Oui, au moins 13 minutes.

Ouf, elle a répondu.

-C’est chiant hein.

-Oui, oui.

-………

-…........

-Dis moi, ça te tente de marcher, moi j’en peux plus d’attendre.

-Oui, pourquoi pas.

Et c’est comme ça que moi et le bonhomme Michelin, on s’est mis à marcher pour rentrer chez nous, c’était aussi simple que ça, cinq minutes avant je ne la connaissais pas et cinq minutes plus tard, la fille au manteau horrible me proposait de marcher avec elle.


Je me suis dit que si on marchait dans le même sens elle devait forcément habiter a coté de chez moi, c’est étrange, une habillée comme ça j’aurais du la remarqué bien avant, come on elle avait un rayon complet de l’Armée du Salut sur elle.

-T’habite proche d’ici ?

-Oui, au coin de Levesque et Rachel ?

-T’es sérieuse moi aussi.

Quelle coïncidence !

Il y en a eu d’autres des coïncidences, on a du marché pendant au moins 30 minutes et j’ai appris beaucoup d’autres choses sur elle.
Elle était célibataire, elle habitait seule dans un tout petit studio au coin de Levesque et Rachel, l’appart était a son ex qu’elle a fini par mettre dehors en récupérant le bail, elle est comédienne dans une troupe de théâtre ( je l’aurais juré, en la voyant, j’ai tout de suite su qu’une fille habillé de façon aussi horrible ne pouvait être qu’une excentrique, une artiste ……….), qu’elle avait des chaussures rouges ( une excentrique, je vous le dis…………) et qu’elle aimait beaucoup la glace a la vanille de Haagen Danz ( ne me demandez pas comment je l’ai su ).

C’était étrange, je n’étais pas de nature social, pas du genre en tout cas à rencontrer comme ça des jeunes filles excentriques en plein hiver a Montréal mais avec elle, j’ai tout de suite était à l’aise.
Moi qui ne disais jamais rien sur rien, j’ai encore dit rien sur rien mais je l’ai écouté me parler d’elle.
Malheureusement, le trajet était court et on est arrivé chez nous en 30 minutes a peine.

Le coté positif était qu’en fait, on était quasiment voisin…….de palier……..d’immeubles.

Elle habitait sur ma rue mais juste quelques numéros plus bas.

-Bon, on est arrivé.

-Oui, j’habite juste la.

-Enchanté, au fait, c’est quoi ton nom ?

-Si tu montes prendre un verre pour te réchauffer, je te le dis.

Incroyable, mais c’est qui ce monstre, cette chose qui bouge qui dit ce qu’elle veut, qui a un manteau énorme et qui m’invite a venir chez elle, comme ça, mais merde ou sont passés les codes de l’éthique amoureuse, ah non, non, ça ne fait pas, quelle impolitesse, quelle indécence, je, je…….

-Oui sans problème.

Je ne peux pas refuser.

Mais il ne fallait pas s’imaginer trop de choses, j’en ai connu d’autres des femmes qui te disent ouin, ouin, viens chez moi et qui en fait veulent que tu gardes leurs chats ou quelque chose comme ça.
Peut être qu’elle ne voulait rien de plus que parler avec moi, je sais pas la ou réellement me donner quelque chose a boire.
Et puis les femmes ne sont pas comme les hommes, pour une femme prendre un verre pour se réchauffer = prendre un verre pour se réchauffer alors que pour un homme prendre un verre pour se réchauffer = on baise mais de toute facon, pour un homme, il n’y a pas grand-chose qu’une femme peut dire qui ne se traduit pas dans son esprit arriéré par on baise ?

On est donc monté dans son studio, un truc horrible, tout petit mais horrible, c’était propre mais le mauvais goût régnait, je vous le dis l’endroit était juste horrible.
Il y a avait des stores violets, un set de cuisine a l’entrée qui devait dater des années 50, un lit qui était au milieu de la pièce avec un couvre-lit a édredon vert, des chaussures de toutes les couleurs, de tous les styles et de toutes les tailles qui traînaient un peu partout et des livres, des tas de livres, des encyclopédies, des atlas, des vieux trucs jaunes, des livres neufs et même des machins horribles qui semblaient être des livres de Dan Brown ou de Werber, je vous dis, plein de trucs horribles que je pourrais décrire mais je n’ai juste pas envie ( d’abord, c’est très chiant de décrire des trucs horribles, ensuite………..ensuite, c’est très chiant de décrire des trucs horribles ).

-Fais comme chez toi.

C’est facile a dire, chez moi ça ressemble pas a ça.

Bon, j’ai taché d’être gentil, j’ai enlevé mes bottes pleines de neiges et je me suis assis sur le lit, c’était le seul meuble qui semblait stable et de toute facon je ne trouvais rien d’autres ou je pouvais m’asseoir dans ce truc horrible qu’elle osait appeler un appart.

Et c’est la, la, que tout a déraillé, je me suis assis sur le lit dans cette pièce horrible, j’ai enlevé mon manteau et je l’ai posé a terre.
Je l’ai regardé, elle, elle ne faisait rien, elle me regardait puis d’un coup comme ça, elle s’est mise a me fixer fixement ( fixer quelqu’un fixement, c’est bien plus que le fixer simplement, c’est un autre niveau dans le fixage, un niveau au-dessus ), elle semblait en trance, totalement.
Et la, elle a doucement commencer a dézipper, son manteau, doucement, tout doucement,en continuant a me fixer, elle me regardait vraiment dans le blanc des yeux, les yeux dans les yeux, elle se déshabillait littéralement et c’est la, la , que j’ai vue, qu’en fait, si elle portait un manteau si énorme, c’est parce qu’elle était nue en dessous, elle ne portait rien, elle était nue, complément nue ( Bon, elle avait un jean et ses affreuses chaussures rouges mais a part ça, elle était complétement nue )..

C’était incroyable, elle avait des seins magnifiques, qui tenait bien en place, qui vous fixait eux aussi, des seins droits, ferme, des seins qui donnait des autres, des seins magnifiques, magnifiques, ces seins, ils devaient servir a donner des leçons dans un cours de chirurgie esthétique tellement ils étaient parfaits..

-Je m’appelle Aurélie.

Et elle était belle, son manteau ( celui qui est horrible ) m’avait empêché de le voir mais elle était réellement belle, elle avait de beaux cheveux mi brun, mi blond, elle avait sur elle un peu de soleil et un peu de nuit.
Sa peau était mat et la fois si pale, légèrement brillante mais en même temps plongé de noirceur.
Elle avait la peau d’une gothique qui passait ses vacances à bronzer à Ibiza.

-Aurélie je te dis.

Moi, je ne disais rien, rien, absolument rien, je la regardais et c’était tout.

-Excuse moi mais je suis pleine de neige, je vais me changer, ça ne te dérange pas.

-Moi pfffffff non, va y, fais comme chez toi, en plus tu sais ici, c’est chez toi.

-Haha, oui.

Anthony Naglaa, toujours le mot pour rire, quelle turfillion ce Anthony Naglaa.

Et elle a fait comme chez elle, son manteau a terre, elle s’est penchée et j’ai vu ces seins bouger, ces seins comme deux poires remplis de soleil, elle avait de belles et larges aréoles, on voyait, on sentait ces tétons durcir, ces seins bougeant de droite a gauche comme un balancier, de ceux qui hypnotisent, de ceux qui donnent envie de vivre, de bander, de baiser, de boire et d’écrire.

Puis, elle a ôté ses affreusetés rubis, elle s’est relevé langoureusement ( comme si le poids du monde était littéralement sur ses épaules et que conséquemment cela prenait de temps pour se relever mais qu’elle le faisait comme même avec grâce ), a détaché sa ceinture, m’a fixé encore avec un petit sourire, le même qu’une hardeuse ferait devant Saint-Pierre et elle m’a dit :

-Ca te dérange si je me mets nue, avec le chauffage, maintenant, je suis tout chaude.

Et la, elle a enlevé tout doucement son jean, je voyais sa culotte, ni un string, ni une culotte grand-mère, juste une culotte; on voyait de face ses hanches et dans sa culotte ( blanche ), on voyait une motte se dessiner, je sentais qu’elle avait des poils, plein, en temps normal je trouvais ça horrible mais la encore une fois, étrangement, j’étais plutôt attiré.
Je voyais aussi ses jambes, elle avait des longues jambes, pales et magnifiques.
Il n’y avait rien à dire sur elle a part qu’elle était magnifique, divine, bandante et exaltante.
Je me suis levé, je n’ai rien dit ( je vous l’ai dis il n’y avait rien a dire sur elle ), je me suis levé, comme ça simplement, naturellement et je suis allé vers elle, elle est restait debout a me regarder et moi je suis allé la rejoindre, elle qui était encore debout prés de sa porte, je l’ai aidé a enlever le reste de son jean qui traînait a ses pieds, je l’ai jeté je ne sais plus ou ( le jean pas elle ), j’ai regardé encore un peu son corps, ses seins, ( je bandais réellement ), ses fesses qui était pas vraiment belle, pas énormes mais au point ou j’étais je m’en foutais royalement, en fait elle m’avait eue a « Si tu montes prendre un verre pour te réchauffer, je te le dis. », j’avais déjà joui la, alors je l’ai amené jusqu’au lit, sans un mot, je me suis déshabillé et sur son lit vert, on a baisé, comme ça, simplement, presque amoureusement mais cette nuit la ce que je lui ai fait une fois son corps nu posé contre le mien, je peux pas le dire tellement c’était horrible.

Anthony Naglaa

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Amour Fou

Un soir de Juillet.

Un feu qui crépite.

C'est le 14.

Fête des têtes en haut d'un échafaud.
Je marchais dans la rue comme une fille qui attend. Je serrais la main de mon amoureux. J'attendais de monter les marches et de me fourrer dans les draps. Une vieille femme vendait des masques de monstres à visages humains. Ils avaient de grosses balafres et des dents jaunes. Enfin,des choses comme cela. J'ai supplié mon homme d'en acheter un parce que je voulais donner un peu de révolution au dos courbé de cette vieille dame et qu'étant indisposée, j'étais plus faible face à mon enfance.

Enfin, les escaliers étaient montés. Enfin, j'étais cachée par la saleté de mes draps. Mon homme nu à côté de moi. Ma main balladeuse pour trouver le masque tombé par terre. Une fellation si tu mets ce masque. Sans ce chantage, de toute façon, mon homme l'aurait posé sur ce visage chaud car il m'aime. Je suis une fille malade et chanceuse. J'avais en moi le sexe de mon amoureux et sur ma nuque, le souffle d'un monstre aux dents remplies de pue. J'étais si épanouie. Je poussais des cris comme si un chien me brisait un orteil. L'épée de mon homme était ensanglantée. J'ai réparé la nature, en la léchant avec amour. Je me suis endormie dans le creux de la nudité floue de mon amoureux.

Sandrine-Léonard

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